Si la créativité est une dynamique universelle, elle n’échappe pas aux résistances et aux freins. On peut dire qu’elle circule naturellement, mais qu’elle se heurte à des obstacles qui, s’ils ne sont pas identifiés, bloquent son déploiement. Ces obstacles apparaissent d’abord au niveau individuel : peur, rigidité, manque d’ouverture, conformisme… Autrement dit, la créativité collective est toujours conditionnée par la créativité individuelle. Lorsque les individus sont bloqués, ces blocages se reflètent immanquablement dans les dynamiques collectives.
C’est pourquoi les blocages psychologiques internes se répercutent dans les ateliers d’idéation, les processus de design thinking ou les projets d’innovation. Un manque d’audace personnelle devient un manque d’originalité collective ; une peur du jugement individuel entraîne du conformisme de groupe ; une incapacité à tolérer l’incertitude se traduit par une divergence écourtée dans les méthodes collaboratives.
Pour analyser ces freins, nous avons choisi de les organiser autour des grandes dimensions du modèle taoïste appliqué à la créativité — Yin, Yang, Qi, Wu et Wu Wei. Chaque pôle de ce modèle peut être bloqué, de l’intuition réceptive (Yin) à l’action rationnelle (Yang), de l’énergie qui circule (Qi) à l’harmonie du vide fertile (Wu) et à la fluidité du non-forcé (Wu Wei).
Ainsi, nous distinguons trois grandes catégories de blocages :
Les blocages psychologiques internes, enracinés dans l’expérience subjective de l’individu.
Les blocages dans les processus d’innovation, qui révèlent, à l’échelle collective, les mêmes résistances.
Les blocages contextuels, liés à l’environnement, à la culture d’entreprise et au climat créatif. Même les individus créatifs peuvent être freinés si le cadre ne favorise pas la prise de risque, la tolérance à l’incertitude et le jeu avec l’imprévu.
Cette triple perspective permet de comprendre non seulement pourquoi la créativité est freinée, mais aussi comment ces blocages se répercutent et se renforcent du niveau individuel au collectif, et du collectif à l’organisationnel.
La créativité : un potentiel naturel qui se bloque
Par nature, la créativité circule en chacun de nous comme une énergie fluide, spontanée et universelle. Elle n’est pas l’apanage de quelques artistes ou inventeurs, mais une capacité humaine fondamentale. Dès l’enfance, nous en faisons tous l’expérience : transformer un objet, inventer une histoire, trouver mille usages à un trombone ou à une boîte vide. Ken Robinson (2001) rappelait par exemple que si l’on demande à des enfants de trouver des usages détournés d’un trombone, ils en énumèrent des dizaines, parfois des centaines. Or, posée aux adultes, la même question obtient à peine quelques réponses.
Ce constat souligne une vérité : la créativité existe à l’état naturel, mais elle se bloque avec le temps. Les recherches de George Land et Beth Jarman (1992), menées sur plus de 1 600 enfants, démontrent qu’à 5 ans, 98 % d’entre eux se situent à un niveau de génie créatif. Ce chiffre chute à 30 % à 10 ans, à 12 % à 15 ans, et à peine 2 % à l’âge adulte. Cette perte n’est pas due à une disparition de la créativité en soi, mais à des blocages accumulés par l’éducation, la socialisation et la peur de l’erreur.
Les psychologues de la créativité, comme Teresa Amabile (1996), rappellent que l’expression créative repose sur trois piliers : la motivation intrinsèque, les compétences techniques et la pensée créative. Or, ces piliers se fragilisent à mesure que l’on adopte des comportements conformistes, que l’on craint le jugement ou que l’on cherche davantage à éviter l’échec qu’à explorer le nouveau.
Ainsi, la créativité peut être comprise comme une énergie circulante qui, par défaut, tend à se bloquer. L’enjeu n’est donc pas de “fabriquer” la créativité à partir de rien, mais de comprendre où et comment le flux créatif se bloque pour permettre à cette énergie de retrouver sa fluidité. C’est ce que nous allons explorer en détaillant les différents types de blocages associés aux pôles Yin, Yang, Wu, Wu-Wei et Qi.
Les bloquants au Yin
Dans la dynamique de la créativité, le Yin correspond à la phase réceptive, intuitive et divergente du processus. C’est l’espace de l’imagination, de la rêverie, de l’intuition, de l’incubation et de l’illumination. On pourrait le rapprocher du Système 1 de Daniel Kahneman (2011), rapide, intuitif, associatif, ainsi que des étapes d’incubation et d’illumination décrites par Graham Wallas (1926). C’est le moment où l’esprit se met en retrait, accepte le vide, et s’ouvre à l’univers des possibles.
Or, cette dimension Yin est fragile et peut facilement se bloquer.
1. Blocages psychologiques internes
La peur du vide et de l’incertitude : La créativité exige une tolérance au paradoxe et à l’inconfort (Csikszentmihalyi, 1996). Or, beaucoup cherchent à “remplir le vide” trop vite, à contrôler, sans laisser mûrir l’incubation.
La peur du jugement : Amabile (1996) a montré que les environnements évaluatifs inhibent la pensée divergente. La crainte d’être jugé “ridicule” ou “hors-sujet” pousse à l’autocensure.
Le conformisme cognitif : Sternberg & Lubart (1999) insistent sur le rôle de la “défiance constructive” face aux normes. À l’inverse, se rabattre sur ce qui est déjà connu limite l’émergence d’idées originales.
L’absence de rêverie : Runco (2007) souligne l’importance du jeu mental, du silence et du lâcher-prise. Un esprit saturé d’objectifs n’a plus d’espace pour les associations nouvelles.
2. Blocages dans les processus d’innovation
Ces mêmes obstacles apparaissent dans les méthodes de créativité et d’innovation.
Design Thinking / Double Diamond : Souvent critiqués pour produire “beaucoup de post-it mais peu d’idées radicales” (Kimbell, 2011). La divergence est écourtée par la pression de livrer rapidement une solution présentable.
Creative Problem Solving (CPS) : Isaksen & Treffinger (2004) montrent que l’efficacité chute quand le problème est défini trop étroitement, ou quand la sélection des idées est trop rapide. Le Yin est ainsi “tué” prématurément.
Lean Startup : Eric Ries (2011) valorise l’expérimentation rapide. Mais Blank (2013) et York & Danes (2014) notent que cette dynamique accélérée empêche l’incubation et bloque les intuitions vraiment disruptives.
Culture organisationnelle : Rickards (1996) et Puccio et al. (2011) observent que les organisations valorisent surtout l’analytique (Yang), au détriment de l’intuitif (Yin), conduisant à des innovations surtout incrémentales.
3. Blocages contextuels
Pression du résultat immédiat : Amabile (1998) a montré que les environnements orientés vers l’efficacité court terme réduisent fortement la créativité.
Environnements saturés : Sawyer (2012) rappelle que l’imagination demande des espaces propices au jeu, à l’exploration et au silence. Un excès de contraintes bloque l’ouverture Yin.
Priorité donnée au rationnel : Une culture qui valorise exclusivement la logique et la rationalité réduit la tolérance à l’incertitude – pourtant essentielle au Yin.
En résumé, le Yin se bloque chaque fois qu’on refuse le vide, la divergence et l’incertitude. Dans la psyché humaine, cela se manifeste par la peur et le conformisme. Dans les organisations, cela se traduit par des processus tronqués ou des cultures trop orientées vers le contrôle. Quand le Yin est bloqué, la créativité se dessèche, et les méthodes d’innovation échouent à générer de véritables percées.
Les bloquants au Yang
Dans la dynamique de la créativité, le Yang correspond à la phase active, rationnelle et convergente du processus. C’est le moment où l’on structure, où l’on sélectionne, où l’on donne une forme concrète aux idées. Le Yang est associé au Système 2 de Kahneman (2011), lent, analytique, délibératif, ainsi qu’aux phases de vérification et d’élaboration du modèle de Wallas (1926). C’est grâce à cette dimension que les intuitions Yin peuvent se transformer en projets réalisables et pertinents.
Mais cette dimension peut, elle aussi, se bloquer. Quand le Yang se rigidifie, la créativité reste sans ancrage, ou bien elle s’étouffe dans un excès de contrôle rationnel.
1. Blocages psychologiques internes
Perfectionnisme excessif : Le besoin que tout soit “parfait” avant même d’avancer peut paralyser l’action créative (Flett & Hewitt, 2002).
Analyse infinie : Le “paralysis by analysis”, où l’évaluation rationnelle ne s’arrête jamais, bloque la concrétisation des idées (Kahneman, 2011).
Peur de l’échec : La crainte de se tromper empêche d’expérimenter ou de prototyper. Elle freine l’itération nécessaire pour affiner une idée (Bandura, 1997).
Rigidité cognitive : Tendance à s’enfermer dans un seul cadre de pensée, sans flexibilité pour ajuster ou reformuler le problème (Guilford, 1967).
2. Blocages dans les processus d’innovation
Design Thinking / Double Diamond : Dans la phase convergente, l’excès de rationalisation conduit souvent à retenir des idées “sûres” et facilement acceptables, plutôt que des pistes audacieuses. Brown (2009) note que les contraintes organisationnelles amènent souvent à revenir à des solutions classiques.
Creative Problem Solving (CPS) : La phase d’évaluation peut dériver en critique prématurée, étouffant les idées avant leur maturation (Isaksen & Treffinger, 2004).
Lean Startup : La logique de “mesurer et pivoter” peut basculer vers un court-termisme où seules les idées validées immédiatement par le marché survivent, au détriment de visions plus ambitieuses (Blank, 2013).
Innovation managériale : Des travaux (Christensen, 1997) ont montré que les entreprises privilégient souvent des innovations incrémentales, car elles paraissent moins risquées, mais négligent les innovations de rupture.
3. Blocages contextuels
Pression à la rentabilité : Les environnements focalisés sur le retour sur investissement rapide laissent peu d’espace au prototypage et à l’itération longue (Amabile, 1998).
Normes bureaucratiques : Une organisation avec trop de règles ou de hiérarchie rigidifie le processus convergent et empêche la flexibilité (Puccio et al., 2011).
Temps contraint : La convergence exige maturation et prototypage ; des délais trop serrés forcent des choix hâtifs, souvent sous-optimaux.
Surcharge de données : L’hyper-analyse quantitative peut faire perdre de vue l’essence qualitative d’une idée, ce que certains auteurs appellent “le piège du big data” (Mayer-Schönberger & Cukier, 2013).
En résumé, le Yang se bloque lorsqu’il devient excès de contrôle : soit parce qu’il bride l’intuition trop tôt, soit parce qu’il s’enferme dans une logique rationnelle infinie. Sur le plan individuel, cela se manifeste par la peur de l’échec, le perfectionnisme et l’obsession analytique. Dans les organisations, cela se traduit par des processus bureaucratiques, des choix sécuritaires et une focalisation excessive sur le court terme. Un Yang bloqué empêche les idées de prendre forme et réduit la créativité à un exercice abstrait, jamais incarné.
Les bloquants au Qi (Chi)
Dans la dynamique de la créativité, le Qi (ou Chi) correspond à l’énergie vitale qui circule entre le Yin et le Yang, permettant la fluidité du processus. Sans Qi, il n’y a pas de mouvement : les intuitions Yin restent stériles et les structurations Yang deviennent rigides. On peut l’associer à la “fluidité créative” décrite par Csikszentmihalyi (1996) dans son concept de flow, ou encore à ce que Fredrickson (2001) appelle les “émotions élargissantes”, qui favorisent l’expansion de la pensée et l’ouverture au possible.
Or, cette énergie est particulièrement vulnérable aux blocages, qui empêchent la créativité de circuler.
1. Blocages psychologiques internes
Stress chronique et anxiété : Ils réduisent les ressources cognitives disponibles et empêchent la disponibilité intérieure nécessaire à l’expérience de flow (Csikszentmihalyi, 1996 ; Fredrickson, 2001).
Épuisement émotionnel (burnout) : L’énergie créative s’épuise dans la surcharge, menant à une incapacité à “laisser circuler” l’élan créatif (Maslach & Leiter, 1997).
Manque de confiance créative (creative self-efficacy) : Bandura (1997) a montré que l’auto-efficacité influence directement la capacité d’action ; sans croyance en son potentiel, l’énergie créative est bloquée.
Fragmentation attentionnelle : L’esprit dispersé, constamment sollicité par les notifications ou interruptions, n’a pas l’espace mental pour maintenir un flux créatif continu (Mark, Gudith & Klocke, 2008).
2. Blocages dans les processus d’innovation
Fragmentation organisationnelle : Quand les processus d’innovation manquent de cohérence, l’énergie créative se perd en silos. Sawyer (2012) rappelle que la collaboration doit être fluide pour que l’énergie circule.
Itérations mécaniques : Dans des approches comme le Lean Startup, si l’itération devient purement mécanique, elle coupe le lien vital entre exploration et concrétisation : on fait tourner la roue sans élan véritable.
Absence de continuité : Certaines organisations lancent des projets créatifs sans les mener à terme, créant une frustration qui bloque le flux collectif.
Perte de sens : Teresa Amabile (1996) insiste sur l’importance du sens et de la motivation intrinsèque. Quand les projets sont déconnectés des valeurs profondes, le Qi s’épuise rapidement.
3. Blocages contextuels
Climat organisationnel négatif : Environnements toxiques, où dominent la peur et la compétition, inhibent la circulation du Qi (Edmondson, 1999 sur la psychological safety).
Manque de ressourcement : Le Qi, comme l’énergie vitale, exige des moments de pause, de récupération, de jeu. Les cultures qui valorisent l’hyper-productivité tuent cette respiration créative.
Absence de vision collective : Sans alignement sur une finalité partagée, l’énergie des individus se disperse plutôt que de s’harmoniser.
En résumé, le Qi se bloque lorsque l’énergie créative, au lieu de circuler librement, est fragmentée, épuisée ou déconnectée du sens. Sur le plan individuel, cela prend la forme du stress, de l’épuisement ou du manque de confiance. Dans les organisations, cela apparaît par des projets menés sans cohérence ni vision, ou par des cultures qui détruisent la motivation intrinsèque. Quand le Qi ne circule plus, la créativité perd sa vitalité et se réduit à une mécanique vide.
Les bloquants au Wu
Dans la dynamique de la créativité, le Wu correspond au vide, à la suspension, à la réceptivité totale. C’est le moment de “laisser être”, où l’esprit accepte de ne pas tout contrôler pour que l’émergence advienne. On peut le rapprocher de l’importance des espaces transitionnels chez Winnicott (1971), du “non-agir” taoïste (wu wei), ou encore de la capacité à tolérer l’incertitude et l’ambiguïté (Kaufman & Beghetto, 2009).
Mais cette dimension est délicate : beaucoup d’individus et d’organisations n’arrivent pas à accueillir le vide.
1. Blocages psychologiques internes
Intolérance à l’incertitude : incapacité à “s’asseoir dans le vide” sans chercher immédiatement une réponse. Comme le note Csikszentmihalyi (1996), la créativité exige une tolérance au paradoxe et à l’inconfort.
Besoin compulsif de contrôle : volonté de tout planifier, tout maîtriser, qui empêche l’abandon créatif nécessaire à l’émergence.
Anxiété du vide : certains individus vivent le silence et l’absence de consignes comme menaçants plutôt que féconds.
Impatience : tendance à vouloir des résultats immédiats, sans laisser le temps de l’incubation.
2. Blocages dans les processus d’innovation
Cadres trop rigides : les méthodes comme le Design Thinking, quand elles deviennent trop procédurales, réduisent la place laissée à l’indéterminé. Comme le dit Lucy Kimbell (2011), la promesse de créativité peut se transformer en “recette” qui tue l’ouverture.
Manque de temps pour l’incubation : les phases de “non-agir” sont souvent perçues comme une perte de temps dans les organisations pressées. Pourtant, Wallas (1926) montrait déjà que l’incubation est une étape indispensable.
Culture de l’immédiateté : l’exigence de résultats rapides pousse à court-circuiter le Wu. On saute directement à la production sans passer par le silence créatif.
Espaces saturés d’activité : dans les ateliers ou les sprints, chaque minute est programmée. Le Wu est donc expulsé par la densité même du processus.
3. Blocages contextuels
Environnements sans silence : bruit constant, interruptions, surcharge informationnelle (Mark, Gudith & Klocke, 2008) empêchent la disponibilité intérieure.
Cultures productivistes : valorisation du “faire” (Yang) au détriment du “laisser être” (Yin/Wu). Comme le souligne Amabile (1996), ces cultures voient le temps de pause comme une inefficacité.
Absence de lieux ou rituels propices : l’imagination a besoin de “zones tampons” (Oldham & Cummings, 1996) : moments de promenade, rêverie, retrait. Sans cela, le Wu n’existe pas.
En résumé, le Wu est bloqué quand l’individu ou l’organisation ne sait plus accueillir le vide. L’intolérance à l’incertitude, la peur du silence, la rigidité procédurale et la culture du résultat immédiat étouffent l’espace de réceptivité. Or, sans Wu, la créativité devient agitation vide : on produit des solutions rapides mais sans profondeur, faute d’avoir laissé maturer l’univers du possible.
Les bloquants au Wu Wei
Le Wu Wei est au cœur de la créativité vivante : il ne s’agit pas de passivité, mais d’un agir en résonance avec ce qui émerge. Comme le dit Alan Watts (1975), le Wu Wei est “une action sans effort, où l’on se laisse porter par le courant plutôt que de nager à contre-courant”.
Or, cette dimension peut facilement se bloquer, tant chez l’individu que dans les processus collectifs.
1. Blocages psychologiques internes
Volontarisme excessif : chercher à “forcer” la créativité, à produire coûte que coûte. Cela génère stress, rigidité et résultats artificiels (Runco, 2007).
Contrôle rigide de soi : incapacité à se laisser aller au processus, peur de perdre le contrôle. Csikszentmihalyi (1996) souligne que l’état de flow survient justement quand le contrôle conscient s’assouplit.
Anxiété de performance : quand l’attention est dirigée vers le résultat attendu plutôt que sur le processus fluide, le Wu Wei s’éteint (Amabile, 1996).
Perfectionnisme : obsession de l’erreur et recherche de maîtrise absolue, qui bloque la spontanéité.
2. Blocages dans les processus d’innovation
Sur-procéduralisation : trop de méthodes, de cadres, d’étapes. Comme le notent Brown & Katz (2009), certaines formes de Design Thinking deviennent des carcans : le processus prend le dessus sur le flux créatif.
Agendas trop serrés : le Wu Wei suppose du temps pour que l’action se fasse naturellement. Dans les “innovation sprints”, le rythme effréné empêche la fluidité.
Culture du KPI : quand la créativité est mesurée uniquement en résultats quantifiables (nombre d’idées, rapidité), le geste spontané se transforme en production forcée.
Leadership directif : des managers qui imposent constamment des consignes au lieu de créer un climat de confiance bloquent le Wu Wei collectif (Edmondson, 1999).
3. Blocages contextuels
Environnements hiérarchiques : une culture du contrôle et du commandement freine la confiance nécessaire au lâcher-prise.
Absence de confiance psychologique : Amy Edmondson (2019) insiste : la sécurité psychologique est un prérequis à l’expression libre. Sans elle, les individus hésitent à suivre leur intuition.
Obsession de la vitesse et de la productivité : société du “toujours plus vite” qui va à l’encontre du rythme organique de la création.
Systèmes éducatifs centrés sur la performance : comme l’a montré Ken Robinson (2006), l’école apprend davantage à éviter l’erreur qu’à expérimenter librement.
En résumé, le Wu Wei se bloque dès qu’on veut “forcer” le processus : trop de contrôle, de règles, de pression sur le résultat. Or, la créativité exige une forme de danse avec le réel, une action fluide et ajustée. Sans Wu Wei, la créativité devient tension, et l’énergie créative se fige au lieu de circuler.
Tableaux récapitulatifs
Certains blocages sont transversaux, car ils touchent toutes les dimensions de la créativité. D’autres sont spécifiques à chaque pôle (Yin, Yang, Qi, Wu, Wu Wei). Les deux tableaux qui suivent distinguent ces deux niveaux.

